Bayeux et ses alentours

 

Abbaye Saint Martin de Mondaye

 

Hôtellerie de la Joie Saint Benoit



Ce périple dans le Calvados des VMF (Vieilles Maisons Françaises) de Seine Maritime rayonne autour de Bayeux, ville arrosée par l’Aure et située à seulement dix kilomètres de la Manche, donc toute proche des plages du débarquement. Epargnée par les bombardements, la ville regorge de maisons médiévale et de vieux hôtels, de ruelles discrètes et de musées, dont celui de la dentelle et celui abritant la célèbre tapisserie dite de la reine Mathilde, l’épouse flamande de Guillaume le Conquérant, en réalité une broderie réalisée par des ateliers anglais. On y flâne volontiers à pied, gardant comme point de repère les hautes flèches de sa cathédrale. Nous logeons dans les élégants bâtiments conventuels des sœurs bénédictines de l’Hôtellerie La Joie Saint Benoit, dans un cadre bucolique, comme préservé du monde, à la décoration minimaliste quoique confortable.

 

D’abbaye en ferme manoir

Le cloître

Dans le choeur de l'abbaye



La bibliothèque
L'abbaye Saint Martin de Mondaye



La chapelle aux fresques

Pour ne pas abandonner trop vite la vie monastique, notre première visite sera pour l’abbaye Saint-Martin de Mondaye, fondée au XIII è siècle et modernisée au XVIII è sous l’impulsion du père Eustache Restout. Cette communauté de chanoines Prémontrés fut dispersée lors de la Révolution, pour renaître en 1859. En France, elle compte aujourd’hui 40 frères vivant à Mondaye, Conques, Sarrance et Tarbes. Ils sont 1300 dans le monde, ayant pour mission d’être curés de villages, aumôniers d’hôpitaux ou de prisons, de scouts ou de patronages en mêlant vie contemplative et apostolique. L’abbaye de Mondaye accueille retraites, conférences et sessions diverses. On y séjourne au rythme de la vie monastique. Située dans un joli parc, elle comporte une élégante église du XVIII è en cours de restauration, un cloître, une chapelle aux fresques bien modernes, une bibliothèque essentiellement religieuse, ainsi que de vastes bâtiments conventuels et agricoles.

Le pressoir de Cremel

Il existe dans la région une quarantaine de fermes manoirs, autrefois occupées par de petits seigneurs ou des fermiers enrichis, leur particularité étant que le manoir se dresse parmi les bâtiments agricoles. Celle de Cremel, à Monceaux en Bessin, a été bien restaurée par ses propriétaires, M. et Mme Christophe de Saint-Louvent, qui se sont attachés à réhabiliter l’ensemble des bâtiments formant presque une cour intérieure, entreprise ambitieuse et rentabilisée de façon intelligente. La plus vaste des granges sert pour des concerts ou des conférences, les autres bâtiments ont été séparés et loués en logements indépendants ouvrant sur l’extérieur. Chacun est pourvu d’un jardin clos, de façon à ce que chacun puisse jouir sans dommage de son espace personnel.

Le salon

La ferme-manoir de Cremel


Les châteaux d’Esquay sur Seulles et de Brécy

Esquay sur Seulles

Le château d'Esquay sur Seulles

L'autre façade




Château de Brécy

Cet élégant petit château édifié par Pierre de Pierrepont seigneur d’Esquay au XVII è siècle et doté d’un escalier en fer à cheval présente une façade d’accueil souriante et paisible, alors que l’autre côté de la demeure a un aspect plus défensif, avec des douves sèches et un ancien pont levis aujourd’hui remplacé par une simple passerelle. Labyrinthe, vastes pelouses bordées de tilleuls taillés « à la reine », bassin et jet d’eau forment un ensemble harmonieux, le terrain ayant été habilement creusé devant le château pour former une cuvette et un joli effet de perspective.

Château de Brécy

Château de Brécy


Les célèbres jardins de Brécy

Les grilles monumentales du château de Brécy annoncent déjà une certaine théâtralité, alors que le château en lui-même est plus modeste qu’Esquay, avec une toiture d’un seul tenant. On peut parler d’une véritable mise en scène des jardins s’étageant sur quatre terrasses. Rien d’étonnant à cela quand on sait que Brécy fut racheté en 1910 pour quinze francs or par la comédienne Rachel Boyer, alors maîtresse du ministre du la Culture. Rachel entreprit des travaux considérables pour restaurer et embellir les jardins existant déjà au XVII è siècle. Alors que la maison date de 1620, les premiers jardins furent aménagés par Jacques Le Bas en 1697, montrant une influence italienne certaine. On peut aussi les considérer comme un mémorial élevé à la mémoire de sa fille Estelle, enterrée dans l’église voisine. Un temps abandonnés après la mort de Rachel, ils furent sauvés en 1958 par Jacques de Lacretelle et son épouse, qui organisèrent les broderies et les topiaires, creusèrent les bassins. Puis Barbara et Didier Wirth prirent le relai à partir de 1992 et agrandirent encore les jardins qui forment parfois de véritables tentures de feuillages bien ordonnées, ce qui nécessite l’emploi de deux jardiniers à plein temps !

 

A Fontaine Henry, les toits les plus hauts de France

Château de Fontaine-Henry
Salon à Fontaine-Henry

Fontaine-Henry joyau de la Renaissance




Pierre-Apollinaire d'Oilliamson



Son propriétaire actuel, Pierre-Apollinaire d’Olliamson, reconnaît lui-même qu’il aura passé sa vie à tenter de comprendre son château : telle galerie débouche sur un mur aveugle, telle fenêtre s’ouvre de façon absurde. Ancien château fort du XII è siècle érigé sur un bras de mer par Henri de Tilly, superbement embelli à maintes reprises à la Renaissance, notamment sous François Ier par Pierre d’Harcourt, il ne fut jamais vendu et toujours habité, mais transmis par les femmes, faute d’héritier mâle. Ce fut l’architecte Blaise Le Preste qui décora le châtelet sous Louis XII et fit ériger les hauts toits soutenus par leur charpente de seize mètres de haut. C’est aussi un château mystérieux, pourvu de nombreux symboles alchimistes qui n’ont pas fini d’être déchiffrés. La fragilité des pierres utilisées pour sa construction donne à la façade une curieuse teinte mi blanche mi ocre, cette dernière teinte révélant que la pierre est usée et devenue très fragile.

L'apprentissage de l'amour


Les salles basses comportent de nombreuses galeries et souterrains aujourd’hui murés. Dans les vestibules, salons ou escaliers de Fontaine-Henry, on remarque surtout de magnifiques tableaux, plusieurs Rigaud et un spectaculaire Apprentissage de l’amour.

Après les splendeurs de Fontaine-Henry, il est émouvant de découvrir, nichée dans son écrin de verdure, la modeste église de Saint-Pierre de Thaon, église romane du XI è et XII è siècle qui aurait un urgent besoin de rénovation, même si la charpente et les toits viennent d’être refaits. Il faudrait encore pourvoir de vitraux ses ouvertures, la paver en assainissant le sol de terre battue bien humide…

 

L'église de Saint Pierre de Thaon

La cathédrale Notre-Dame de Bayeux

Comme bien des édifices religieux, la cathédrale de Bayeux fut souvent remaniée et agrandie au fil des siècles. Ses trois premiers évêques furent sanctifiés, on a ainsi Saint Exupère, Saint Loup, puis Saint Vigor. Ce fut le demi-frère de Guillaume le Conquérant, le plus célèbre de nos Normands dont on célèbrera bientôt le millénaire, Odon de Conteville, qui dédicaça en 1077 la cathédrale et la dédia à Notre-Dame. Il était le fils d’Erluin auquel le duc Robert le Magnifique avait confié son fils Guillaume et la mère de celui-ci, la belle Herlève de Falaise qu’il n’avait pu épouser car elle était d’origine bourgeoise. Il partait alors pour la Terre Sainte afin d’expier une faute grave : il avait empoisonné son frère aîné pour hériter de la duché normande. Empoisonné lui-même sur la route du retour, à Nicée, il ne revint jamais et Erluin épousa Herlève comme il l’avait juré à son suzerain. Alors que la crypte et les tours de façade sont romanes, la nef est gothique.

La cathédrale de Bayeux


Cathédrale Notre-Dame

La crypte

                                                                                                  

La nef




La cathédrale a longtemps abrité la célèbre « tapisserie de la reine Mathilde », une broderie commandée par ce même Odon à des ateliers anglais. Comme il suivit son demi-frère lors de l’expédition anglaise et combattit à ses côtés à Hastings, les historiens considèrent cette broderie comme une source d’informations des plus sûres.

A la mort de Guillaume, ses trois fils se disputèrent ses possessions. Henri Beauclerc, devenu roi d’Angleterre, guignait aussi la Normandie. Il y débarqua et incendia Bayeux, épargnant pourtant la cathédrale où s’étaient réfugiées, dit-on, trois mille personnes. En 1204, le roi de France Philippe Auguste chassa de Normandie Jean sans Terre, roi d’Angleterre et dernier duc de Normandie.

On remarque dans le chœur gothique de magnifiques stalles, œuvre en 1590 du maître Jacques Lefèvre, auquel on doit aussi le buffet des grandes orgues.

Quand on détruisit le jubé en 1863, comme on le fit partout, la tour centrale en fut si ébranlée que l’on dut la reconstruire.

Dans l’impressionnante crypte aux larges piliers encore ornés de peintures, on remarque le gisant d’un certain Gervais de l’Arche, dignitaire du chapitre au XV è siècle. La fresque surmontant son gisant le représente en prière devant la Vierge, protégé par Saint Michel, terrassant bien sûr le dragon. La façade principale est majestueuse, même si l’on peut regretter que l’évêque Rochechouart en eût détruit le portail central afin d’en élargir l’accès. De jour comme de nuit, on voit briller parmi la forêt des pierres un vitrail bien moderne, réalisé dans des tons de bleus, une création de Véronique Jumat.

Toujours guidés par l’historien François Neveux, vice-président de l’association « Les amis de la cathédrale » pour lequel la ville n’a plus de secrets, nous déambulons par les ruelles, visitant les vieux hôtels de la rue Tardif, dont celui construit par le procureur Thomas Morel de la Carbonnière en 1642.

Hôtel de la Maîtrise

 

Cathédrale de Bayeux et vitrail



La célèbre broderie de Bayeux

La bataille d'Hastings

Sans doute exécutée en Angleterre vers 1082 à la demande d’Odon, cette longue et étroite tenture de lin brodée de fils de laine mesure quelque 68,50 mètres de long pour une largeur d’une cinquantaine de centimètres, le récit central étant encadré par deux bandes de 7 à 8cm de haut. Le récit est celui de la conquête de l’Angleterre en 1066 par Guillaume le bâtard, 7è duc de Normandie connu sous le nom de Guillaume le Conquérant roi d’Angleterre. Les principaux personnages sont Edouard, roi d’Angleterre et cousin de Guillaume qu’il avait désigné comme son successeur, son beau-frère Harold Godwin le félon et Guillaume bien sûr.

Broderie de Bayeux, La Mora de Guillaume



Les diverses scènes ont été numérotées au XIX è siècle et permettent une visite guidée facile. Outre son étonnante beauté, cette broderie, qui relate bien sûr l’événement le plus important de la vie de Guillaume, donne aussi des renseignements très précis sur les mœurs et coutumes de l’époque, les vêtements, armes, bateaux, nourriture, villes et travaux des champs.

 

Le château de Balleroy et son musée des ballons

La salle à manger de Balleroy

Le château de Balleroy chef d'oeuvre de Mansart

                                                                                           
Balleroy et ses broderies


Malheureusement bâché lorsque nous le visitons, car la Fondation Roy Eddelman qui en est aujourd’hui propriétaire a lancé de grands travaux de rénovation des toitures et de certaines pierres des façades, Balleroy figure un château fantôme, mais il recouvrera on l’espère toute sa beauté en automne prochain.

La seigneurie de Balleroy fut acquise en 1600 par Jean de Choisy, fils d’un marchand de vin mais conseiller des rois Henri III et Henri IV. Son fils Jean II de Choisy fit appel au jeune François Mansart qui n’avait alors que 28 ans pour construire en même temps le château, le village et l’église. L’entrée s’effectue aujourd’hui par la façade est, alors qu’elle s’effectuait à l’origine par l’ouest. Soucieux de la perspective, Mansart édifia Balleroy selon le goût de la renaissance italienne en flanquant le logis central de deux ailes plus basses, parfaitement symétriques.

Le château fut édifié avec de la pierre blanche de Caen et du schiste ferrugineux violet pour les murs, de l’ardoise pour les toits. Il est entouré de douves sèches décoratives et flanqué de deux terrasses d’agrément, côté cour et côté jardin.

Le Salon d'Honneur

                                                                                    

Les montgolfières de Balleroy

Logé dans le pavillon central, le majestueux escalier est le premier escalier suspendu réalisé en France. Le poids porte sur les murs et il est maintenu par deux clés de voûte. Vestibule, fumoir, salle à manger, bibliothèque et chambres se succèdent. Balleroy fut un temps propriété des Forbes, les célèbres milliardaires, et Chritopher Forbes, le fils de Malcolm, qui adorait le XIX è siècle, a décoré trois chambres dans cet esprit. L’une est dédiée à la reine Victoria, l’autre au roi Louis-Philippe et la troisième à la bataille de Waterloo…

Mais la pièce la plus étonnante est le Salon d’Honneur, toute en trompe l’œil et tableaux datant du XVII è siècle, intégrés dans les boiseries en faux marbre. Si les divers portraits royaux, œuvre de Juste d’Egmont, élève de Rubens, furent restaurés en 1998, on peut remarquer d’inquiétantes fissures dans le plafond, également peint, qui représente la déesse Aurore.

Quant aux jardins, ils subirent d’importantes modifications au XX è siècle, avec la création par Henri Duchêne de jardins à la française s’étalant entre grilles et douves sèches, faits de broderies de buis et de topiaires en pots.

Malcolm Forbes, acquéreur du château en 1970 et passionné de montgolfières, devenu un pilote émérite, aménagea un Musée des Ballons au premier étage des écuries en même temps qu’il organisait un rassemblement annuel de montgolfières à Balleroy. Le dernier, fait en sa mémoire en 1999, rassembla quelques 80 000 spectateurs !

 

Carnet d’adresses

. Hôtellerie La Joie Saint Benoit, 48 rue Saint loup, 14400 Bayeux, Tel. 07 49 50 50 03

. Abbaye Saint Martin de Mondaye, 99 allée du Marché, 14250 Juaye Mondaye, Tel. 02 31 92 58 11

. Ferme-manoir de Cremel, toute de Tilly, 14 400 Monceaux en Bessin

. Château d’Esquay sur Seulles, 8 route de Bayeux, 14 400 Esquay sur Seulles

. Jardins du château de Brécy, 6, place Edmond Paillaud, 14480 Creully sur Seulles

. Château de Fontaine-Henry, 3 le Château, 14610 Fontaine-Henry

. Eglise Saint-Pierre de Thaon, voir mairie de Thaon, 15 Grande Rue, 14610 Thaon, Tel : 02 31 80 04 76

. Cathédrale de Bayeux, voir office du tourisme de Bayeux, Tel : 02 31 51 28 28

. Musée de la Tapisserie, 13 bis rue de Nesmond, 14 400 Bayeux,  02 31 51 25 50

. Château de Balleroy, rue du Sapin, 14 490 Balleroy, Tel : 02 31 21 96 76 

 

 

                                   








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