L’Ethiopie aux sources de l’humanité
|
Petit café d'Addis Abeba |
|
Buffet d'ingéré chez Finfine |
Même si les frontières ne sont pas encore ouvertes, nous pouvons toujours voyager dans nos rêves...
Ce pays grand comme quatre fois
la France et peuplé de cent millions d’habitants, « la Corne de
l’Afrique », jouit d’une culture plusieurs fois millénaire.
Un peu d’Histoire
|
Gamine vers Wenchi |
|
Porteuse d'eau vers Wenchi |
Jamais colonisée si l’on excepte
la brève occupation italienne, ouverte au tourisme depuis une dizaine d’années,
l’Ethiopie a su garder son authenticité. Dans des paysages semi-désertiques
dans le nord, plus luxuriants dans le sud où l’on trouve encore de la forêt
primaire, franchement arides à l’est, dans la région du Dalakil et de ses
immensités salées, ce peuple de pasteurs vit au rythme de ses troupeaux. Bordé
au nord par l’Erytrée, à l’ouest par le Soudan, le Sud-Soudan et le Kenya, puis
la Somalie et le territoire de Djibouti qui la sépare de la Mer rouge,
l’Ethiopie n’a aucun rivage maritime, mais d’innombrables lacs. Ce pays à peine
émergeant n’a d’autres ressources que des mines d’or, de cuivre et d’étain mal
exploitées, un peu de gaz naturel, l’électricité produite par les barrages et
son cheptel, le premier d’Afrique, le dixième mondial.
Lucy, presque humaine
En 1974 fut découvert près de
Hadar le squelette d’une jeune fille dénommée Lucy, en hommage à la chanson des
Beatles, que l’on peut voir au Musée National d’Addis-Abeba. Elle est toute
petite, 1m05, mais se tient debout. Sa cage thoracique développée et ses longs
bras évoquent encore le chimpanzé. Pas tout à fait humaine, elle représente le
chaînon manquant de l’évolution, l’Australopithecus
afarensis. Au IIIè millénaire av.J.-C., des textes égyptiens mentionnent
déjà le riche pays de Pount couvrant une partie de l’Erytrée et le Tigré, au
nord de l’Ethiopie, qui fournissait l’Egypte en myrrhe, encens, ivoire et
épices. Au XII è siècle émerge plus au sud la dynastie des Zagoué dont le roi le plus célèbre, Lalibela, entreprend
la création d’une nouvelle Jérusalem dans sa capitale de Roha. Ce seront les
spectaculaires églises monolithes, dont la plus connue, Saint Georges, creusée
dans une roche rouge, offre au regard son sommet en forme de croix.
« C’est le soleil qui m’a brûlée »
|
Un pasteur près du lac volcanique de Wenchi |
|
Lessive à Zegue |
|
Distribution d'eau vers Gondar |
Ainsi se définit la reine de Saba
dans un poème amoureux à deux voix : le Cantique des cantiques. Il y a
environ 2000 ans, la belle et vertueuse Makéda, entendant vanter la sagesse du
légendaire roi Salomon, se mit en route pour son royaume à la tête d’une
caravane chargée de présents. La veille de son départ, Salomon, amoureux de la
belle reine qui ne lui avait pas cédé, lui offrit un fastueux banquet aux mets
épicés, mais aucune boisson. La reine lui avait auparavant promis de ne jamais
user d’un bien lui appartenant sans lui en avoir demandé la permission. Au
cours de la nuit, Makéda, assoiffée, ne put résister à l’attrait d’une jarre
d’eau fraîche. Salomon, qui l’espionnait, lui reprocha d’avoir rompu sa
promesse et exigea, en guise de réparation, qu’elle devînt sienne. Quand elle
repartit pour son lointain royaume après cette nuit amoureuse, il lui remit un
anneau nuptial. Si elle enfantait un fils, celui-ci devrait, muni de l’anneau,
rendre visite à son père l’année de ses vingt ans. Ainsi en fut-il.
Le fils né de cette union,
Ménélik, devenu roi, vint donc trouver son père, qui le reçut avec honneur, lui
montrant son plus précieux trésor, la fameuse Arche d’Alliance contenant les
tables de la loi de Moïse. Ménélik lui déroba l’Arche qu’il rapporta à Axoum.
Depuis quatre mille ans, cette Arche aurait été cachée de monastère en
monastère, jusqu’à ce que le dernier empereur, Haïssé Sélassié, l’enfouit dans
une crypte secrète de l’église de Notre-Dame de Sion…
Le dernier empereur Haïlé Sélassié
|
Forteresse de Kouskouam |
|
Pope dans l'église de Kouskouam |
En 1930, un certain Tafari est
proclamé Négus et couronné sous le nom de Haïlé Sélassié ou Pouvoir de la
Trinité, mais les armées italiennes s’emparent de la capitale six ans plus
tard. Occupation sanglante, les Chemises Noires laissant 10 000 morts
derrière elles. Mussolini officiellement allié à Hitler, les troupes
britanniques rallient les résistants éthiopiens jusqu’à la reddition italienne
le 5 mai 1941. Même si l’empereur
tente de moderniser son pays, son pouvoir reste trop féodal, le mécontentement
gronde et il est déposé le 12 septembre 1974. Luttes intérieures, guerre avec
la Somalie, famines, l’Ethiopie n’en finit plus de panser ses plaies, jusqu’à
la proclamation, en 1994, d’une république démocratique fédérale. Les problèmes
restent pourtant multiples, dont le plus grave est l’insuffisance de couverture
médicale, avec un médecin pour 30 000 habitants, et la crainte, chaque
année, d’un retard de mousson entraînant de nouvelles famines.
Addis-Abéba, une capitale sans charme
|
Fileuse dans un ancien village juif ou fellash |
Pour cette ville bruyante,
encombrée, hérissée de bidonvilles entre lesquels pointent quelques buildings
modernes, une journée suffit, avec l’exploration de ses deux principaux musés,
celui d’Ethnologie situé dans l’ancien palais d’Haïlé Sélassié et le musée
National. Dans son sous-sol sont exposés les fameux « chaînons
manquants » dont Lucy, dénommée dinknesh,
la merveilleuse, par les Ethiopiens qui en sont si fiers que sa silhouette orne
bon nombre de T-shirts !
Visite rapide à l’église de la
Sainte-Trinité fondée en 1931 par Haïlé Sélassié et à l’Hôtel de Ville en forme
d’étoile à trois branches, petit tour au Mercato, le marché local où il ne faut
pas quitter son argent des yeux, et voilà pour la ville. Une halte sympa pour
déjeuner est l’hôtel-restaurant Finfine Adarash, blottie dans un jardin, à
Masqal Square, l’une des rares vieilles maisons en bois conservées. On y
déguste bien sûr le plat national, l’injera,
crêpe de tef fermentée, céréale
propre à l’Ethiopie, que l’on farcit de légumes, viandes ou poissons et que
l’on accompagne d’une bière locale. A ne pas manquer non plus, la colline
d’Entoto, le premier site de la ville conçue par le roi Ménélik II, d’où la vue
embrasse la capitale. Au pied, les échoppes de souvenirs du marché d’Horomeida
sont plus intéressantes qu’au Mercato.
Une excursion au mont Wenchi
Il faut compter une journée pour
parvenir au mont Wenchi, au sud-ouest de la capitale, après avoir traversé une
région agricole où paissent de vastes troupeaux de buffles et vaches, moutons, ânes
et biquettes gardés par des pâtres aux allures bibliques, drapés dans leurs
grandes capes blanches. C’est le territoire des Oromo, qui comprend une bonne
partie de l’Ethiopie centrale et du sud, entourant la célèbre vallée de l’Omo
où seront construits deux barrages.
Ce mont Wenchi, ancien volcan
dont le cratère forme un lac semé de petites îles où se dresse parfois une
vieille église, s’élève à 3300m d’altitude. Une piste mène à son sommet, où
l’on peut louer un cheval pour descendre jusqu’au lac par d’abruptes sentiers.
Bahar Dar et le lac Tana
|
Anciens bains du roi Fassilidas à Gondar |
|
Sortie d'école à Debark |
Les lignes intérieures sur
Ethiopan Airlines sont aussi sûres que bon marché et de nombreux voyageurs,
rebutés par le coût de location des 4X4, se contentent de faire des sauts de
puce vers les principaux lieux historiques de l’Ethiopie, Bahar Dar, Gondar,
Axoum, Mékélé d’où l’on pique vers Lalibela, le site le plus célèbre du pays
avec sa foison d’églises monolithes. On manque ainsi les admirables paysages
semi-désertiques de l’Amhara et du Tigré et le contact avec la population. Bien
avant Gondar, il n’y a plus de route, mais de la piste, souvent difficile, si
bien qu’il faut par exemple compter onze heures de piste creusée de nids de
poule pour se rendre de Mékélé à Lalibela… Dos fragiles s’abstenir !
Le lac Tana, immense mer
intérieure de 3500 km2, la plus vaste d’Ethiopie, est semé de trente-sept îles,
pour la plupart peuplées de minuscules villages et d’une bonne vingtaine de
monastères. On peut louer des bateaux à l’embarcadère pour mille birrs la
demi-journée, ce qui est suffisant pour visiter Kebran Gabriel et la péninsule
de Zéghé. En dépit de la bilharziose, les villageois font hélas leur lessive et
leur toilette dans le lac…
Les curieux palais et forteresses de Gondar
|
Obélisques d'Axoum, ancienne capitale de la reine de Saba |
|
Bains de la reine de Saba à Axoum |
Il nous faut la
journée pour parvenir à cette ville mythique, berceau de la dynastie du même
nom, située au nord du pays Amhara. Bâtie sur les contreforts du massif du
Simien, cette ville, capitale du royaume du roi Fasilidas, est remarquable par
son enceinte royale entourée de remparts et située au cœur de la ville.
L’édifice le plus célèbre, le palais de Fasilidas, est un massif carré flanqué
de quatre tours.
A la mort d’un
roi, son successeur se faisait bâtir son propre château sans toucher au
précédent, ce qui explique cette étrange juxtaposition de palais. A deux
kilomètres de là, les bains de Fasilidas valent le détour. Imaginez un lieu
paisible planté d’eucalyptus, pourvu d’un vaste bassin servant à la détente du
roi et de ses concubines, ainsi qu’à la cérémonie sacrée de Timkat, qui a lieu
chaque année en janvier et attire d’immenses foules de pèlerins.
De Gondar à
Debark, la route est excellente, mais ça ne dure pas. Ensuite, jusqu’à Axoum,
la piste reste difficile. On longe le parc national des monts Simien, lieu
d’excursion privilégié des trekkeurs et paradis des babouins géladas nommés
aussi « babouins au cœur saignant » pour la tache pourpre étalée sur
leur poitrail.
La fabuleuse capitale d’Axoum où régna la
légendaire reine de Saba
Axoum, laide
bourgade d’un peu plus de 50 000 habitants, fut il y a trois mille ans la
capitale de la reine de Saba. Au nord de la ville, s’étend un champ de stèles
funéraires, dont l’une, haute de 28m est gravée pour représenter une maison à
étages. On peut encore voir des tombes royales, les bains de la reine de Saba,
les ruines de son palais et la fameuse pierre d’Ezana, haute d’un peu plus de
deux mètres, contant les épisodes d’une bataille et gravée en trois langues,
guèze, sabéen et grec. Non loin d’Axoum, l’église d’Abuna Aftse et son petit musée
renferme de beaux manuscrits, dont celui du Miracle de la Vierge.
A Mékélé, on
peut loger dans l’ancien hôtel d’Etat, Abraha Castle, de la terrasse duquel la
vue est superbe sur la ville, mais le confort reste rudimentaire.
|
Sainte-Marie de Sion où serait conservée l'Arche d'Alliance |
|
Vers Hausien |
Lalileba, ses douze églises monolithiques
dont la célèbre Beta Ghiorghis
|
Cérémonie à Michael Barka |
A Lalibela, les
bâtiments blottis dans un joli jardin de l’hôtel Seven Olives, appartenant à
l’Eglise locale, ont l’avantage de jouir d’une agréable terrasse et d’un bon
restaurant. Il est proche de l’entrée du site (compter 50 dollars, dont 35%
reviennent à l’Etat, le reste à l’Eglise, sans enrichit pour autant le
village). On commence par visiter le groupe nord puis, à l’ouest, la plus
fameuse des onze églises, Beta Ghiorghis, la Maison de Saint-Georges.
|
Piété à Beta Medhane Alem, à Lalibela |
Certaines
églises contiennent des fresques, d’autres de simples toiles naïves, avec
toujours ces immenses yeux. Il s’agit en fait d’une sorte de parcours
initiatique, du tombeau d’Adam à l’église du Sauveur du Monde. On a
l’impression de cheminer dans la roche en se rendant d’un lieu à l’autre,
assistant parfois à une cérémonie ponctuée de chants et du bruit des bâtons des
célébrants frappés contre le sol. C’est aussi beau qu’insolite.
|
Passage creusé dans la roche vers Beta Denaghel |
|
La célèbre Beta Ghioghis au toit en terrasse en forme de croix
|
Séparé du groupe
nord par un canal creusé dans la roche et baptisé bien sûr le Jourdain, ce
groupe, plus ancien que le premier, abritait à l’origine les appartements du
roi, de sa suite, de ses ministres et le trésor royal.
Commentaires
Enregistrer un commentaire