Au couronnement du roi du Bhoutan

Le nouveau roi du Bhoutan

Dans ce mystérieux royaume himalayen pas plus grand que la Suisse, coincé entre Tibet et Inde, tout parle de dragon, druk en bhoutanais. Le nouveau roi n’est-il pas le Druk Gyalpo, le Maître du Dragon ? La seule compagnie aérienne se nomme Druk Air et la bière Druk 11 000...
       
La sérénité de Paro
Le dragon s’étale sur les murs des maisons de Paro, à l’ouest du pays, l’unique aéroport, en compagnie de phallus, symboles bien sûr de fertilité. Pas un bruit, mais une immensité de champs dorés, le riz venant d’être coupé. Les hommes en gho et les femmes en kira déambulent dans la seule rue. Le gho est une robe écossaise, serrée à la taille par une ceinture tissée, s’arrêtant aux genoux et se portant au-dessus de hautes chaussettes et de chaussures de ville. La kira des femmes se compose d’une robe enroulée autour du corps, ajustée sous un court boléro.
Une heure de route dans un paysage majestueux mène à Thimphu.

Une langue écrite depuis 1960
On voit que Thimphu, forte de ses 40 000 habitants, est la capitale, deux rues parallèles encadrent la voie principale. C’est la sortie des classes. Au Bhoutan, l’école est mixte, obligatoire et gratuite. L’enseignement se fait en anglais, mais la langue nationale, le dzongkha ou « langue parlée dans les dzong », est également apprise. Ecrite depuis 1960, elle n’a pas une orthographe très stable.

Le col de Dochola
Au col de Dochola, à 3100 m d’altitude, s’élève un chorten, cloche renversée, et claquent des drapeaux de prières. Celui-ci forme une colline coiffée de cent huit petits chorten peints, nombre sacré. En arc de cercle se profilent les sommets enneigés des Himalayas. 
Après avoir suivi le cours de la Panakha chu – la profusion des rivières permet au Bhoutan de vendre à l’Inde son électricité –,  on parvient à Punakha, où un arrogant dzong sert de résidence au supérieur des Bonnets Rouges, le Jé Khenpo, plus haute autorité religieuse du royaume. Celui-ci fait partie des 21 forteresse du royaume datant pour la plupart du XVII è siècle. A la fois places fortes, siège du gouverneur et monastère, ils ont fait l’unité du Bhoutan.

                                                       Dzong de Punhaka

Le dzong de Gasa, dans sa solitude hautaine
La piste suivant la Punatsang chu s’arrête devant un rocher dévalé de la montagne. Il faut continuer à pied avec chevaux, matériel de camping et provisions pour atteindre le dzong de Gasa, perdu dans sa solitude hautaine. Les chevaux franchissent passes et fragiles « ponts de singe ». Celui de Same Zam enjambe les eaux de la Tsachomo chu, mugissant vingt mètres plus bas.
Au matin, la masse du dzong de Gasa émerge de la forêt. A l’intérieur, trente danseurs et chanteurs, des Layap venus de Laya, au nord du royaume, répètent pour le couronnement. Il faut six heures pour rejoindre Gasa Tsa chu. Près de la rivière jaillit une source volcanique, canalisée pour former des bassins. C’est un dimanche et l’on vient y pique-niquer en famille, shampouinant, étrillant les gamins, lavant le linge de la semaine. L’eau est presque trop chaude, sulfureuse.
Lever à sept heures sous une pluie battante. La forêt s’est changée en marécage, les sentiers en patinoires.

Festival tantrique au dzong de Bumthang
Bumthang s’épanouit dans une gorge creusée par la Puna Tsang chu. Le dzong s’étale au-dessus de la vallée, à 2600 m d’altitude. Ce 29 octobre, dixième jour du mois lunaire, on y célèbre le festival de Tsechu. Dans la cour principale, des moines masqués, pieds nus, en robes de brocart, jaillissent de la grande porte, tournent sur eux-mêmes en se déhanchant pour que leurs manches effleurent le sol, pris de transes. Leurs masques à têtes de morts ou d’animaux leur donnent un aspect fantomatique.


                                            Coiffes noires au dzong de Bumthang

Tout un peuple célèbre son 5 è roi
Thimphu s’agite en cette veille du couronnement. On accroche les dernières banderoles, on nettoie les rues, on achève les arcs de triomphe. Le long de la voie principale, les enfants des écoles agitent leurs drapeaux ornés d’un dragon blanc. Tout se passe dans le dzong de Thimphu, en ce 6 novembre 2008, jour du couronnement de Sa Majesté Jigme Khesar Namyel Wangchuck, 5 è roi de la dynastie des Wangchuck.
Les premiers membres de la procession incarnant des divinités terribles arrivent. On retient son souffle en attendant ce roi de 28 ans auquel son père abandonne le trône. Enfin, il est là, marchant entre deux haies de spectateurs, enveloppé dans l’écharpe royale, ému. Il est beau, il est jeune, il est exotique, il est roi, mais Tintine a eu beau faire, elle n’a pas réussi à s’affubler des vêtements de cérémonie qu’il lui a offerts, ainsi qu’aux autres journalistes. Tout ça ne tient que par des épingles et tombe au moindre geste avec assez peu de dignité. Dommage, elle se prenait déjà pour une princesse…Et son beau roi pénètre dans la Salle du Trône interdite au public. Son père le coiffe de la couronne brodée surmontée d’une tête de corbeau. A l’intérieur, les cours s’ornent de bannières brodées de vingt mètres de haut. Six cents Bhoutanais assistent aux danses ayant lieu dans le stade du dzong. C’est le délire quand le roi paraît.
Les deux jours de cérémonie suivants se déroulent dans celui de Thimphu pouvant contenir 2000 personnes. Le premier est dédié à l’armée, le second aux jeux. Le défilé militaire commence par la garde royale, splendide dans ses uniformes datant de trois siècles. L’armée se rassemble devant la tribune pour saluer le roi d’un triple hurrah repris par la foule.

Les moines dansent pour rappeler l’assassinat d’un roi
On attend la mystérieuse danse tantrique des Coiffes Noires ou shanag. Les moines masqués de la tête de mort chassent les mauvais esprits, leur danse contant l’assassinat d’un roi tibétain au IX è siècle. Ils se contorsionnent et tourbillonnent, leurs jupes étalées dans un scintillement d’or.
A trois heures, tout est fini, le roi s’en va, les gradins se vident, les équipes de nettoyage se mettent au travail.
Les moines assistent au spectacle
Pour le troisième jour, place aux jeux, joutes des « hommes forts », combats à coups de sacs de son de deux adversaires accrochés à une barre au-dessus d’une cuve d’eau glacée. Dans une aire voisine, s’exercent les tireurs à l’arc, le sport national. On acclame les meilleurs coups. Survient le roi, qui tire sa flèche sous les acclamations et repart aussi vite qu’il était venu. La fête est finie.
Fiche pratique : Ce voyage a été organisé par Compagnie du Monde, 5, av  de l’Opéra, 75 Paris, Tél. : 01 53 63 33 42.

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