Froufrous fous

Pour 2011, adoptez les dessous fripons de Chantal Thomass



Son look étrange, casque de cheveux noirs et grosse frange, lèvres très rouges, lunettes scintillantes, bottines et vêtements uniformément noirs sont devenus sa marque, de même que ses guêpières, bas résilles et dentelles en stretch vendus dans des boutiques-boudoirs, dans plus de vingt-cinq pays.

Chantal Thomas chez elle, dans son décor glamour,
et le célèbre capiton rose devenu sa marque


Toujours sophistiquée, même à sa table de travail


Taille de guêpe comme à la Belle Epoque et dentelles en fibres modernes

Quand on franchit le seuil de sa boutique tout en capiton rose du 211, rue Saint-Honoré, Paris ler, on a l’impression de se retrouver dans un univers douillet et confortable, drôle et raffiné faisant plus songer au boudoir d’une élégante de la Belle Epoque qu’à une boutique. On s’y sent tout de suite en confiance, enclin à faire mille folies en achetant quelques uns de ces dessous froufroutants et malicieux portant la griffe aujourd’hui prestigieuse de Chantal Thomass. Et quand on entre dans son élégant appartement blanc et rose du XVI è arrondissement, on ressent aussitôt le même sentiment de bien-être, s’enfonçant délicieusement dans ses canapés capitonnés de rose, la marque de son site Internet, pour déguster un thé aux amandes dans de précieuses tasses de porcelaine « rocaille ». Le secret de la réussite éclair de Chantal Thomass est que tout semble évident dans sa façon de marketer ses créations : évident de prendre pour teinte dominante ce rose qui suggère si bien la chair féminine, évident de miser sur le goût intime des femmes qui ne supportaient plus le stricte minimalisme en matière de lingerie des années soixante et étaient prêtes à dépenser pour leurs dessous, même pour leur propre plaisir, évident d’allier la mode des corsets étranglés de la Belle Epoque à l’emploi de matières faciles à porter et à entretenir : dentelles fabriquées à Calais, certes, mais réalisées en fibres modernes telles que stretch ou polyamide. Pourtant, ce fut un long cheminement avant de trouver sa voie et de combler un manque évident, car il n’y avait pas de vrais stylistes et créateurs dans la mode de la lingerie, pas non plus de défilés avant l’arrivée en fanfare de Chantal Thomass.

Tout commença en « bidouillant » ses uniformes de pensionnaire

Avec un père ingénieur et une mère couturière, l’avenir de Chantal Thomass – c’est son vrai nom – ne semblait pas forcément tout tracé. « Ma mère n’exerçait plus qu’à la maison et en particulier elle me faisait toutes mes robes. Dès l’âge de dix ans, j’ai commencé à très bien savoir ce que je voulais et à l’influencer. Ensuite, détestant mes tristes uniformes bleu marine de pensionnaire, j’ai pris l’habitude de largement les « bidouiller ». Pas très assidue dans mes études et lisant plus volontiers Elle ou Vogue que mes bouquins scolaires, je ne me passionnais que pour la mode, si bien que mes parents m’ont fait suivre à tout hasard des cours de dessin. Ensuite, ils m’ont à ma demande émancipée pour que je puisse fonder à 18 ans avec mon fiancé peintre une petite société de prêt-à-porter jeune et loufoque appelée Térébenthine. On travaillait dans le garage familial. Dorothée bis, la boutique branchée des juniors, rue de Seine, nous a pris nos créations et ce fut vite le succès. »
Ce fut précisément ce succès qui posa ses premiers problèmes à Chantal Thomass. Il fallut vite augmenter le capital pour étendre la société, donc trouver des investisseurs. Chantal, qui s’était séparée de son premier amour et associé, abandonna la marque Térébenthine pour la sienne et intéressa des investisseurs japonais qui avaient la société Worl. L’aventure avec eux dura de 1985 à 1995.
« Worl pensa alors pouvoir se passer de moi et me vira brutalement, tout en gardant l’exploitation de ma marque dont je ne possédais que 34%. Je ne pus rien faire, mais être dépossédé de son propre nom, c’est dur. J’ai alors travaillé comme simple consultante pour des modèles de lingerie de luxe auprès des marques américaines Victoria’s Secrets, Wolford et Saralee, une société qui possédait déjà Dim, Pletex et Wonderbras. J’ai pu convaincre Saralee de racheter ma marque aux Japonais. Début 2006, Saralee a été revendu à Sun Capital qui possède aussi Dim. On peut donc dire que je travaille en collaboration avec Dim pour Sun Capital. »

Les femmes en guerre contre la lingerie minémaliste

Chantal comprit vite qu’il y avait un vrai manque en 1995 dans le domaine de la lingerie féminine, la mode étant alors aux modèles minimalistes, peu chers et confortables, mais dépourvus de féminité, sans dentelle ni fanfreluches, jugées trop difficiles d’entretien. Le challenge pour elle fut donc de s’engouffrer dans la brèche en proposant des « parures » (culotte et soutien-gorge) coquines, très féminines et faciles à entretenir grâce à l’emploi de fibres nouvelles. Elle remit à la mode guêpières et porte-jarretelles confortables et peu fragiles, bas résilles très voluptueux. « Avec mon équipe marketing, comme on dit maintenant, qui se compose en fait de deux personnes plus moi, on a tenté de décliner une ligne sur toute une gamme, en attirant aussi les juniors avec des « parures » ne dépassant pas la somme de 120 euros. On a aussi décidé de faire deux collections par an, comme la Haute Couture. Le meilleur coup de pub que j’ai jamais eu et qui m’a valu de faire parler de ma lingerie dans tous les médias me vint des « Chiennes de garde » en 1998. J’avais alors obtenu des Galeries Lafayettes de faire toutes les vitrines avec mes modèles de lingerie, de vrais mannequins venant parfois figurer dans les vitrines en une sorte de happening. A mon sens, c’était drôle, raffiné et pas le moins du monde indécent, mais ce ne fut pas l’avis des Chiennes de garde qui y virent une référence aux fameuses vitrines des prostituées d’Amsterdam. Je n’aurais jamais pu rêver meilleure opération de marketing ! »

Le parfum, intimité et identité d’une femme

Lorsque les directeurs du parfumeur français P et B, dont le siège est à Paris, sont venus trouver Chantal pour lui demander de créer un parfum à son image, le challenge l’a amusée et deux nouveaux parfums ont vu le jour à partir de 2001, « Chantal Thomass » et « Ame coquine », des flagrances selon ses goûts, à la fois capiteuses et impertinentes. Ensuite ce fut le tour d’un fabricant de parapluies, de lampes Berger, de papeterie de luxe. « Si le pari me plaît, je m’efforce de convaincre mes associés et quand j’ai leur accord, je fonce sur mes carnets de croquis et je dessine comme une folle. Sans avoir l’extraordinaire coup de crayon de Christian Lacroix, je dessine des projets assez nets et précis pour bien me faire comprendre. Ensuite, c’est au fabricant qui m’a contactée de faire fabriquer le produit, puis de le diffuser, en nous payant sous forme de royalties. J’ai en particulier beaucoup apprécié de travailler pour la société Atomic Soda, spécialiste de boîtes de rangement et papeterie de luxe, qui est venue me voir et pour laquelle j’ai conçu toute un éventail d’agendas, papier à lettres et carnets dans une gamme rose et fausse dentelle noire à mini prix en vente dans les Grands Magasins. J’aime bien ce genre d’action ponctuelle. Dans le même esprit, j’ai par exemple imaginé une ligne de prêt-à-porter féminin, masculin et enfants sur vingt pages du catalogue des Trois Suisses. Et, pour 2007, je travaille à une ligne de bougies très féminines et coquines pour la société Point à la Ligne.»

Pour en savoir plus :
-   Boutique Chantal Thomass, 211, rue Saint-Honoré 75001 Paris, Tél. : 01 42 60 40 56.
-   Voir le livre « Plumes et dentelles » aux éditions Ramsay, consacré aux collections Chantal Thomass, 24,50 euros.
-   Ou aller sur son site : www.chantalthomass.fr.

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