Pouilles et Basilicate, splendeurs de l’Italie du Sud
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Bari, la basilique Saint Nicolas |
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Et son merveilleux plafond peint |
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Un mariage haut en couleurs |
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Le surpenant décor de l'hôtel Oriente |
La terre en
est certes aride et rocheuse, ne laissant guère pousser qu’oliviers et pins et
l’on croit à tort ces provinces pauvres. C’est oublier leur intérêt stratégique
et les enjeux dont elles furent l’objet de la part des Romains, Normands,
Souabes, Angevins ou Aragonais et l’importance de leurs ports, richesse
reflétée par la rutilance de leurs églises et palais baroques.
Le talon de la Botte de Bari à Tarente
En dépit de
l’extension de son port, Bari donne déjà le ton, avec son centre historique
épargné constituant un vrai labyrinthe de petites ruelles aux belles demeures
ornées de sculptures, aux balcons majestueux où sèche le linge. Rien d’étonnant
à ce que les audacieux Normands venus du Cotentin, menés par les impétueux
frères Hauteville et parmi eux le fameux Robert Guiscard, l’un des frères de
Guillaume Bras-de-Fer, eussent guigné la côte est italienne, important point de
départ pour le commerce avec l’Orient. Bari possède donc son château normand,
plus tard embelli et agrandi par le mythique Frédéric II de Hoenstaufen, que
l’on appelait aussi la « Stupeur du monde », homme de guerre et de
savoir, qui parlait l’arabe couramment et s’intéressait tant à cette
civilisation qu’il dut subir les foudres
des papes Grégoire IX puis Innocent IV. D’autres fortifications furent ajoutées
au Château Souabe ou Castello Svevo au XVI è siècle.
Quant à sa
basilique Saint-Nicolas, l’une des plus anciennes églises normandes du Sud, son
intérieur immense et dépouillé offre un saisissant contraste avec son plafond
de bois peint datant du XVII è siècle. Le Duomo, cathédrale romane datant du XI
è siècle, a conservé son plan et sa coupole d’influence byzantine.
Dans la ville
nouvelle, le B&B de la Casa Pimpolini, au 249 de la Via Calefati
(080 521 99 38), près des boutiques élégantes et des restaurants, propose
de jolies chambres à des prix attractifs.
En plongeant
vers le Sud, les ports sont ravissants, Mola di Bari, Monopoli avec ses barques
de pêche d’un bleu rivalisant avec celui de la mer et sa forteresse en bord de
mer, son dédalle de ruelles, Polignano a Mare et sa Porta Grande donnant accès
au centre historique, puis, piquant vers l’intérieur des terres, Alberobello et
ses célèbres
trulli séculaires,
inscrits au Patrimoine Mondial de l’Unesco.
Dans sa
vieille ville, tant sur le Rione Monte que le Rione Ala Piccola à l’est se
serrent plus d’un millier de
trulli,
ces habitations rudimentaires, faites de pierres chaulées de blanc et coiffées
de lauzes, qui servaient initialement de refuges aux bergers ou même aux
animaux, avant de devenir les maisons des paysans les plus pauvres, maintenant
si prisées qu’elles se sont muées en hôtels ou demeures de luxe quand elles
sont réunies ou boutiques de souvenirs hélas trop nombreuses. Plus récent, le
Trullo Sovrano, édifié au XVIII è siècle par la famille d’un prêtre, comprend
un étage et est à présent aménagée en musée. Passer une nuit dans un trullo est
facile à réaliser en louant un appartement Via Monte San Gabriele (Tél. :
080 432 38 60).
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Le délicieux port de Monopoli |
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Les étonnants trulli des Pouilles |
Tout près et
plus à l’est, Martina Franca, bourg aux maisons éclatantes de blancheur, est
célèbre pour son Arco di Sant’Antonio débouchant sur la Piazza Roma où se
dresse son élégant palais ducal édifié au XVII è siècle et décoré d’innombrables
fresques inspirées de la mythologie romaine, à présent siège de la
municipalité. En suivant le Corso Vittorio aux élégantes demeures patriciennes
se prenant pour des palais, l’on parvient à la Piazza Plebiscito, dominée par
la Basilique de Saint Martin datant du XVIII è siècle.
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Lecce, les fresques inspirées de la mythologie
de l'ancien Palais du Gouverneur |
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Une belle place à Lecce |
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L'étonnant plafond de la cathédrale à l'opulence
baroque |
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Le majestueux amphithéâtre romain de Lecce |
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La façade tourmentée de la cathédrale |
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Féerie nocturne à Lecce |
Retour sur la
côte avec Lecce, ville baroque par excellence, hérissée de palais et d’églises,
dont sa délirante Basilica di Santa Croce à la façade en vraie dentelle de
pierre et son intérieur de style Renaissance, sa Piazza del Duomo datant du XII
è siècle, encadrée par le palais épiscopal du XV è siècle et le Seminario conçu
au XVIII è siècle par l’architecte Giuseppe Cino.
On peut y
dormir dans le B&B Prestige, situé en plein centre historique à l’angle de
la Via Santa Maria (Tél. : 0832 30 35 06).
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Chapelle Pierre et Paul à Otrante |
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Et son massif château aragonais |
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La délicieuse rade de Gallipoli |
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Le plafond baroque de sa cathédrale |
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Sa vieille pharmacie demeurée comme autrefois |
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Toute l'exubérance de sa Chapelle de la Pureté |
Toujours plus
au sud, Otrante surplombe un port baigné par les eaux toujours bleues de
l’Adriatique, mais la ville fut hélas mise à sac en 1480 par Ahmed Pacha et ses
18 000 Turcs. Il en subsiste une cathédrale du XI è siècle bâtie par les
Normands et une étonnante mosaïque plus tardive d’un siècle, conçue par un
jeune moine du nom de Pantaleone et représentant un gigantesque arbre de vie où
s’ébattent Adam et Eve, mais aussi Hercule ou Diane, le roi Arthur et Alexandre
le Grand, escortés par une vraie ménagerie de singes, serpents et monstres
marins. A droite du maître autel, la Cappela Mortiri offre dans sept grandes
vitrines l’étalage macabre des ossements de ses martyres. Castello Aragonese et
Chiesa di San Pietro, ornée d’éclatantes fresques byzantines, constituent les
autres curiosités de la ville.
Faisant le
pendant d’Otrante sur la côte ouest, côté mer Ionienne, Gallipoli, la belle
ville en grec, mérite bien son nom avec sa cité médiévale s’avançant vers la
mer, ses hauts remparts, sa Baia Verde s’ouvrant vers le sud, sa cathédrale
Sainte Agate à la façade ornementée par Zimbalo, qui donna à Lecce son
exubérant style baroque, ses moulins à huile souterrains, creusés dans le tuf
et sa vieille pharmacie ornée de délicieux pots à onguents et servant encore.
Une bonne
adresse pour y dormir : La Casa del Mare, située dans une belle demeure du
XVI è siècle, au 14, Piazza de Amicis, Tél. : 333 474 57 54.
La Basilicate et ses sassi, le château ésotérique de Frédéric II
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Tarente et les colonnes de l'ancien temple de Poséidon |
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Le port industriel de Tarente |
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Vue de Matera Franca, la ville aux sassi |
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Matera Franca et son lacis de ruelles |
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Dominant la gorge, San Pietro Caveoso |
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Vue sur Santa Maria d'Idris |
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L'une de ses fresques d'inspiration byzantine |
Si la légende
veut que Tarente fut jadis fondée par Taras, le fils de Poséidon, la vieille
ville a bien pâti de la ville nouvelle et de l’essor de son port moderne et il
ne reste plus grand-chose de la prospère cité romaine. Le centre médiéval et
les anciens palais Renaissance, désertés au profit des quartiers neufs, font
grise mine et n’expriment plus que la nostalgie des choses qui se meurent
lentement. Perché sur une petite île séparant la Mar Piccolo ou Petite Mer, en
réalité une lagune fermée, de la Mar Grande ou Grande Mer, ce centre médiéval,
en dépit de quelques rénovations insuffisantes, semblent aujourd’hui bien
décati. On peut cependant admirer, comme dans la plupart de ces ports, un
grandiose Castello Aragonese du XV è siècle, témoin de la gloire passée, des colonnes
ayant appartenu au temple de Poséidon, un Duomo de style roman du XI è siècle
et la merveilleuse Capella di San Cataldo, festival de fresques et d’incrustations
en marbre polychrome.
Ensuite, en
piquant vers l’ouest, on aborde la sauvage Basilicate, plus rocheuse et
montagneuse, aux sommets coiffés d’anciennes forteresses, et l’une de ses
villes les plus étonnantes, Matera Franca et ses célèbres
sassi, ses habitations troglodytes habitées dès la période
paléolithique. Imaginez une profonde gorge où roulent les eaux d’un torrent,
délimitant deux quartiers bien distincts, le Sasso Barisano, bien restauré, sur
le flanc nord-ouest, et le Sasso Caveoso, plus pauvre, au nord-est, et près de
trois mille grottes s’ouvrant dans la roche, flanquées de petites maisons
chaulées de blanc, s’étageant sur les reliefs des falaises. Il faut marcher à
l’aventure dans ces ruelles tortueuses, escalader sans peur de se perdre ces
volées d’escaliers. De la place Vittorio Veneto où s’élève un Duomo dont les
murs plongent à pic vers la gorge, la vue est prodigieuse sur l’ensemble du
ravin et ses maisons troglodytes. Beau panorama aussi en empruntant la route
Tarente-Laterza en direction des étonnantes églises rupestres aménagées du VIII
è au XIII è siècles et ornées de belles fresques dans le style byzantin. La
plus surprenante est sans doute l’église de la Madonna delle Virtu, faisant
partie d’un monastère installé dans une douzaine de grottes reliées entre
elles, aux peintures bien restaurées.
Si, dans les
années cinquante, plus de la moitié de la population pauvre de Matera vivait
encore dans ces
sassi précaires
évoqués par l’écrivain Carlo Levi dans son livre émouvant,
Le Christ s’est arrêté à Eboli, elle fut par bonheur relogée par le
gouvernement dans des habitations plus décentes. Rénovés, relookés à grand
frais, nombre de
sassi constituent
aujourd’hui des hôtels de luxe, tel ce délicieux Locanda di San Martino, au 71,
Via Fiorentini, Tél. : 0835 25 66 00, à la piscine d’eau chaude creusée
dans la roche et aux belles chambres troglodytiques.
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Castel del Monte, le mystérieux château de Frédéric II |
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L'imposante entrée du château |
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Des salles octogonales communiquant entre elles,
jadis ornées de marbre rouge et de corail |
On ne peut
bien sûr manquer, en remontant vers le nord et le promontoire de Gargano,
l’étonnant Castel del Monte, un château ésotérique à la destination encore
mystérieuse, peut-être le chef d’œuvre architectural de ce même Frédéric II
dont le nom est indissociable de ces deux provinces. Dominant tout le paysage
alentours de sa formidable masse octogonale pourtant d’une harmonie parfaite,
classé au Patrimoine mondial de l’Unesco et merveilleusement restauré, il
s’organise autour d’une cour à ciel ouvert et ne fut jamais habité, comme
l’atteste son absence de cuisine. Ne comportant ni douves, ni pont-levis, ni
meurtrières, sa fonction ne pouvait être défensive. On pense plutôt que son
plan, conçu autour de l’octogone, fusion du cercle et du carré et donc symbole
de la perfection divine et humaine, figurait la relation de l’homme à Dieu,
message laissé aux générations futures par cet homme de grand savoir, élevé à
Palerme par un précepteur arabe, grand admirateur de cette civilisation alors
si en avance sur son époque. Flanqué de huit tours octogonales pourvues
d’espaces réservés aux ablutions, si importantes dans le monde arabe, le
château comporte un étage et des pièces communicantes pourvues de vastes
cheminées. Il faut l’imaginer, avec ses colonnes de marbre, ses murs également
ornés de marbre et ses fenêtres aux encadrements de précieux corail…
Le promontoire du Gargano
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Encore un château de Frédéric II à Barletta |
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Monte San Angelo émergeant du brouillard |
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Une rare porte d'argent et de bronze fondue à
Constantinople |
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Une église souterraine comme celles des
preùiers chrétiens |
La route file
parmi les sombres forêts de chêne du Parc National de Gargano, aussi denses que
sauvages, idéales pour les pique-niques et randonnées, puis monte en lacets
jusqu’au Monte Sant’ Angelo, souvent noyé d’un brouillard si épais que l’on n’y
voit pas à trois mètres. Outre le charme de ses ruelles aux maisons chaulées de
blanc, ce bourg est surtout célèbre pour son Santuario di San Michele, qui
attire d’immenses foules de pèlerins venus adorer l’archange qui aurait,
croit-on, laissé l’empreinte de son pied gravée dans la roche. De superbes
portes byzantines de bronze et d’argent, fondues à Constantinople, protègent l’entrée
d’un bien curieux sanctuaire souterrain évoquant les lieux de prières des
premières communautés chrétiennes. Face au sanctuaire, l’hôtel San Michael,
simple mais agréable, offre la plus jolie vue de la ville (Tel. :0884 56
55 19).
A la pointe
du promontoire, Peschici s’accroche à sa falaise et domine de ses remparts une
mer toujours bleue. Puis Vieste, jolie ville blanche s’avançant vers
l’Adriatique, possède aussi sa formidable forteresse, militaire celle-ci, due à
Frédéric II, décidément un grand bâtisseur. Dans son église d’Amara, située Via
Cimaglia, furent décapités par les Turcs au XVI è tous les habitants qui s’y
étaient réfugiés.
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Peschici, à la pointe du promontoire |
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Vieste et ses remparts plongeant vers la mer |
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Le romantique port de Trani |
Une jolie
route longeant la côte en traversant oliveraies et vergers redescend ensuite
vers Trani au port abritant élégants yachts et barques de pêche. Le centre
historique comprend bien sûr nombre de palais, son Duomo campé face à la mer, à
l’intérieur presque austère orné de colonnades, son castello édifié en 1233 par
Frédéric II toujours, puis renforcé par Charles Quint et son église de Santa
Maria Scolanova, une ancienne synagogue où l’on admire un magnifique tableau
byzantin de la vierge. On peut y loger dans un palais familial du XVII è aux
spacieuses chambres avec vue sur la mer (Albergo Lucy, Tél. : 0883 48 10
22).
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Trani baignant dans des eaux bleues |
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La rigoureuse pureté de la cathédrale de Trani |
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Et son altière forteresse |
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