Du Tonlé Sap au
Mékong
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Embarquement sur le Tonlé Sap |
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Le Mékong Prestige |
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Sur le Mékong |
Plus vaste réserve d’eau douce du sud-est asiatique, le
Tonlé Sap est à la fois lac et rivière. Il est situé juste au sud d’Angkor,
dans une vaste dépression naturelle, donc exactement au centre du Cambodge. Le
régime de la rivière portant ce nom est unique au monde. Selon la saison, de
novembre à mai, elle coule du lac vers le Mékong au sud-est et s’inverse de mai
à novembre, le lac servant alors de déversoir aux crues du Mékong causées par
la fonte des neiges himalayennes. On parle alors de « retournement des
eaux », la Fête des Eaux ou Bon Om Touk se situant au mois de novembre,
lorsque les eaux sont les plus hautes. On peut alors circuler en barque parmi
la « forêt immergée », louvoyant parmi les hauts fûts des banians.
Ensuite, la rivière s’écoulera à nouveau normalement, vers le Mékong. Le volume
d’eau du Tonlé Sap est donc très variable, couvrant 2700 km2 pour une
profondeur d’un mètre seulement à la saison sèche, superficie multipliée par
six environ à la fonte des neiges. Non navigable à la saison sèche, le lac le
redevient par bonheur en cette période de Noël.
Le charme du
Mékong Prestige
A l’embarcadère de Phnom Krom, des vedettes russes
rapides nous mènent jusqu’au Mekong Prestige qui nous attend paisiblement sur
les eaux enfin navigables du Tonlé Sap. Le bateau s’avère à taille très
humaine, confortable, avec un large pont ensoleillé joliment fleuri et pourvu
d’un mini bassin où se rafraîchir. Les innombrables décos de Noël clignotent un
peu partout. Les cabines sont bien conçues, toutes pourvues de douches,
toilettes, rangements et mini balcon où
prendre le soleil. Même si celles du pont supérieur sont plus chères, je
préfère quant à moi naviguer au ras de l’eau pour mieux voir les innombrables
petites barques venues tournoyer autour de nous ou, plus tard, les habitants
des innombrables house boats vaquant à leurs occupations, lessive, cuisine,
soin des enfants…
Tout de suite, Kevin, le manager du bateau, nous met dans
l’ambiance en nous présentant l’ensemble de l’équipage puis en nous soumettant
à son fameux « questionnaire tordu » - vraiment tordu, pas de doute
là-dessus ! Les tables de huit permettent des rencontres conviviales, les
menus du chef vietnamiens sont succulents. Vins et alcools gratuits à volonté,
ce qui n’est pas si courant ! Kevin collecte 50E de pourboire
général par personne pour l’ensemble de la croisière, ce qui nous libère du
problème désagréable de savoir que donner et à qui. Et vogue le Mékong Prestige
dans un silence appréciable, les moteurs ronronnant à peine !
Bourgades
fluviales et houses boats
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Gamine à Kampong Chhnang |
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Gamin à Kampong Chhnang |
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Scène de rue à Kampong Chhnang |
En me levant le lendemain matin, je peux observer la
ronde de minces pirogues pointues à moteur semblant voler sur l’eau et qui
rasent notre cabine. Petits coucous de part et d’autre, qui est le plus
exotique pour l’autre ? Après un copieux petit-déjeuner buffet – le chef
pétrit son pain lui-même – nous débarquons dans la bourgade fluviale de Kampong
Chhnang. Petit marché animé tout au long du fleuve, nuée d’enfants tous plus
souriants les uns que les autres. Nous goûtons d’innombrables fruits exotiques.
Litchis, durians à l’odeur de cadavre mais à la chair agréable, ramboutans,
pitayas ou fruits du dragon, kakis, corosoles, caramboles ou anones forment des
pyramides multicolores. Les étals de viandes sont moins appétissants, signalés
comme partout par un essaim de mouches, coquillages de toutes tailles et
énormes poissons chats bien moustachus. Les petites maisons sur pilotis ont au
moins le mérite de ne pas vaciller dans le fleuve. Quant aux constructions en
dur, elles présentent des façades fort étroites à cause des taxes et se
prolongent loin à l’arrière. Puis nous embarquons sur des barques pour nous
rendre au village flottant voisin où, en effet, école, échoppes et même le
commissariat sont flottants. Les houses boats sont le plus souvent amarrés les
uns aux autres et on peu aussi y circuler à pied sec. La plupart comportent un
grand bassin se prolongeant sous l’habitations où sont élevées de milliers de carpes
vendues ensuite aux marchés.
Visite en chars
à bœufs et Oudong
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Char à boeuf à Kampong Tralach et pagode Wat Kampong Leu |
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Bassin de la pagode Vipassana Dhura à Oudong |
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Bonze devant la pagode Vipassana Dhura |
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Bonzes en prières à la pagode Vipassana Dhura |
Déjeuner à bord et reprise de la navigation vers une
autre bourgade, assez semblable à la première, Kampong Tralach. Là nous attend
tout un cortège de chars à bœufs tirés par d’élégantes bêtes blanches à longues
cornes et nous constituons bien sûr l’attraction du village. Promenade au pas
lent des bêtes, parfois au petit trot si le fouet du conducteur se montre
convaincant, puis visite de la pagode Wat Kampong Leu. En assez triste état, elle
comporte pourtant de magnifiques fresques qui auraient un besoin urgent de
rénovation, le maître les ayant peintes ayant aussi décoré le Palais Royal de
Phnom Penh.
De là, des bus nous mènent à Oudong, ancienne capitale
khmère du Cambodge de 1618 à 1866. Une série de pagodes, stupas et monastères
s’élèvent à l’abri de collines abritant la cité. La plus grande des pagodes, la
Vipassana Dhura, comporte les stupas des derniers rois khmers. Un peu trop
dorée sur tranches à mon goût, même si elle est harmonieuse et de taille
imposante, avec un immense bassin où se mirent des statues également très très
dorées…
Les sourires de
Chong Koh
Dîner à bord et débarquement le lendemain dans le petit
village de tisserands de Chong Koh. Partout résonne le bruit des métiers à
tisser et un joli magasin propose le travail des artisans, puis un professeur
nous fait visiter l’école primaire du village qui prospère surtout grâce aux
dons des touristes. Les bâtiments flambant neuf prouvent assez que le sourire
des enfants – l’irrésistible sourire khmer – a su délier les bourses.
Garçonnets en uniformes dans une travée, fillettes dans l’autre, tous entonnent
docilement le chant de bienvenue scandé par la maîtresse. Il y a bien quelques
fusées en papier qui volètent ça et là, comme dans toutes les écoles du monde.
Les uniformes sont d’une propreté rigoureuse, les livres bien tenus, les rires
fusent partout. Des élèves heureux à n’en pas douter !
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Ecole de Chong Koh |
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Tissage de la soie à Chong Koh |
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Toilette des cavhes dans le Mékong |
Déjeuner à bord, puis le Mékong Prestige reprend sa
paisible navigation vers Phnom Penh. Il y a bien dix ans que je n’étais revenue
dans cette capitale du Cambodge que je visite pour la troisième fois et, si je
reconnais l’élégance des toits incurvés du Palais Royal et de ses dépendances,
de ceux de la Pagode d’Argent, je suis ahurie par la quantité de buildings
poussés un peu partout comme des champignons géants. « Les Chinois,
m’explique Kevin, ils sont partout… »
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Arrivée à Phnom Penh, les gratte-ciel côtoient les palais |
Nous débarquons non loin du fameux Wat Phnom ayant donné
son nom à la ville et nous escaladons cette petite colline de 27m de haut,
pourvu d’un stupa, d’une pagode et d’un pavillon où sont déposées les multiples
offrandes de faux billets, de fleurs et de fruits. En dépit de la presse de la
foule, l’atmosphère est recueillie, dans ce sanctuaire bouddhiste appartenant
au Petit Véhicule, tandis que le Vietnam suit quant à lui les préceptes plus
mystiques et ésotériques du Grand Véhicule où la pratique régulière de la
méditation permet au sage enfin dépourvu de tout désir d’accéder à l’état de
Bodhisattva et d’arrêter la Roue de la Vie, c’est-à-dire le cycle infernal des
réincarnations.
Nous retrouvons, lors du spectacle donné à bord par
musiciens et danseurs locaux, la grâce des ravissantes Apsara ou danseuses
célestes présentes partout sur les vieille pierres d’Angkor.
Palais Royal,
Pagode d’Argent et musée National
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Offrandes à la colline de Wat Phnom |
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Ferveur au Wat Phnom |
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Le charme colonial du bar du Raffles |
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Musique et danses khmères à bord |
La journée du lendemain est consacrée à la visite de la
capitale du Cambodge. Devenue capitale sous l’occupation française, mais fondée
en 1434, la ville est bien située au confluent.
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L'élégante somptuosité du Palais Royal |
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Les toits aux tuiles colorées du Palais Royal |
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Fresques d'une galerie du Palais Royal |
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L'opulente Pagode d'Argent |
du Tonlé Sap et du Mékong. Un million cinq cent mille
Cambodgiens y vivent sur 290 km2. C’est le siège du gouvernement et la
résidence du roi Norodom Sihamoni qui règne depuis l’abdication de son père en
1993 mais ne gouverne pas. Il est célibataire et sans descendance. De nombreux
immeubles Art Déco dont le fameux Hôtel Raffles très bien rénové témoignent
encore de la présence française, tant qu’ils ne sont pas remplacés par les
ambitieux gratte-ciel chinois… Deux grands marchés, un peu étouffants mais
pittoresques, proposent tout l’artisanat de la ville mais aussi des produits
locaux : le marché central et le marché russe. Une demi journée au moins
est nécessaire à la visite du complexe royal, où l’on ne peut espérer rester
seul, de l’harmonieuse Pagode d’argent et de sa collection de Bouddhas, une
autre à celle du Musée National, l’un des plus délicieux endroits de la
capitale, avec ses murs roses, ses toits incurvés, ses collections de
sculptures et son romantique jardin intérieur creusé de bassins où fleurissent
les nénuphars. J’ai visité une fois le fameux lycée 521, le tristement célèbre
lycée français où furent emprisonnés et torturés avant d’être fusillés tous les
prétendus opposants au régime de Pol Pot et ça m’a suffi, je n’y retournerai
pas. Âmes sensibles s’abstenir. On torturait et fusillait pour rien, pour le
port de lunettes, des mains trop blanches, trop de diplômes, une simple
dénonciation jamais vérifiée. Bilan : 4 millions de morts pour rien…
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Symphonie de roses et jardin tropical au Musée National |
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Un lieu de paix et de poésie |
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Le mystérieux sourire khmère |
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L'harmonie parfaite du Musée Royal |
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Sur lequel veille bien sûr Bouddha |
Le lendemain sera le seul jour entièrement consacré à la
navigation, mais Kevin, toujours inventif, nous a réservé des surprises :
course au trésor pour gagner une bouteille de vin et grignotages corsés. Au
menu, serpents, grenouilles, cafards, tarentules et scorpions grillés à
déguster… avec modération. Nous passons la frontière peu avant le déjeuner puis
naviguons vers Tan Chau, au Vietnam.
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