LES BONS PLANS DE TINTINE

La cabane du pêcheur avec Sabine Letoux

 
1. La Mayenne en chambres d’hôtes

Rien de tel que l’hébergement en chambres d’hôtes pour prendre l’exacte température d’une région et de ses habitants. Région trop peu explorée par le tourisme car la Mayenne n’est ni au bord de la mer ni à la montagne, ce pays de riantes collines boisées, de belles fermes en pierres de taille, de multiples châteaux (on dit que c’est la région de France où ils ont le mieux proliféré !) est idéale pour les randonnées à pied ou à cheval, les baignades dans les plans d’eau. Bref pour l’apprentissage de la vraie campagne de France, avec ses cultures de blé et de maïs, ses vaches paissant dans les prés, ses rivières et ses étangs charmeurs.
De chambres en chambres et d’hôtes en hôtes, les ambiances diffèrent, mais il y a toujours, chez les six propriétaires qui ont reçu Tintine, la même volonté de changer tout à coup de vie pour vivre plus près de la nature et faire partager à leurs invités une même passion pour une campagne authentique et rare.

 
La chambre des parents
Le petit dèje
La cabane du pêcheur
Sabine Letoux par exemple a acheté avec son mari Antoine, spécialiste des installations d’accro branches, le parc de dix hectares d’un ancien relais de chasse à Forcé, à quinze minutes à vélo de la gare de Laval. Outre les parcours dans les arbres et les cabanes perchées qui plaisent tant aux enfants, ils viennent de construire pour y vivre comme un trappeur canadien une cabane sur l’eau, qui se mire dans la surface plane de son étang. Un pont-levis que l’on peut lever la nuit pour se sentir comme sur une île ravira les petits. 105 € pour deux avec le petit déjeuner, de 14h à midi le lendemain pour bien en profiter. Couchage possible pour quatre avec 15 € par personne supplémentaire. On peut sur place randonner dans les bois, essayer la tyrolienne géante, monter les poneys et se faire servir des plateaux repas, tout ça bien sûr avec des suppléments. Tél. 06 10 43 61 77 et voir www.lebois-mayenne.fr

Le moulin de Thuboeuf

Le moulin de Thuboeuf sur la Vicoin
Brigitte Couenon devant sa maison

A onze kilomètres au sud de Laval, dans la paisible vallée de Vicoin, Brigitte et Jean-François Couenon ont aménagé un ancien moulin en fonction jusqu’en 1902 avec salon et trois chambres d’hôtes de styles bien différents : confort à l’anglaise, ambiance exotique et design. La quatrième, située dans leur propre maison, où l’on prend aussi le petit déjeuner, est accessible en fauteuil roulant. Le haut du moulin comporte sauna et salle de fitness. 69 € la chambre pour deux personnes avec petit déjeuner. Tel. : 02 43 53 63 10 et contact@lemoulindethuboeuf.com et voir www.lemoulindethuboeuf.com

La chambre exotique du moulin
La demeure de l’Ile à Craon

Blottie sous son cèdre, la demeure dans l'Ile

Chantal Bretaudeau mettant la dernière touche à son buffet
En pleine ville, mais sur un vaste terrain comportant une vraie petite île baignée par l’Oudon, cette ancienne maison de tanneur avec ses dépendances, l’une aménagée en maison d’hôtes et l’autre en gîte, ferait plutôt penser à une maison des champs tant elle est paisible. La maison d’hôtes comprend trois chambres de couple, 95 € la nuit pour deux avec petit-déjeuner et
1000 € par semaine le gîte pour quatre.

Le salon dont on peut acheter bien des objets

Une élégante harmonie de mauves

Maintenant qu’elle est veuve, Chantal Bretaudeau a mis ses talents de décoratrice dans l’arrangement harmonieux de ces deux maisons où elle continue de vendre à ses hôtes les objets chinés par elle. Exceptionnelle cuisinière, elle organise des dîners à la demande, 30 € par personne le repas avec les vins. Tél. 02 43 06 37 07 ou bretaudeau@wanadoo.fr et voir le site sur www.demeuredelile.com
La chambre aux cages

Le salon du gîte
Un manoir à Saint Brice

Sabine Colombani recevant ses hôtes
 au bord de la piscine

On peut prendre le petit déjeuner sous la tonnelle
Sabine et Vincent Colombani ont eu le coup de foudre pour ce manoir des Forges datant du XVI è siècle et restauré par le grand chef Michel Oliver, à 5 minutes de la ville de Sablé et de son golfe. Ils proposent à leurs visiteurs quatre chambres et une suite double, avec la jouissance d’une vaste piscine et d’un agréable jardin,  entre 95 € et 135 € la chambre pour deux avec petit déjeuner, table d’hôtes à la demande. Tél. : 02 43 70 84 40 ou contact@manoirdesforges.fr ou voir le site sur www.manoirdesforges.fr
Une amusante salle de bain à l'ancienne

Une chambre épiscopale très kitch

Une délicieuse maison médiévale à Sainte-Suzanne

Le salon du rez-de-chaussée

La cuisine salle à manger du ler étage
La chambre du bonheur








Le château de la Cour
A deux pas de l’église de cette vieille cité médiévale ayant encore sa forteresse et ses remparts, dans un triangle situé entre Le Mans, Rennes et Saint-Malo, Juliette Durand a acquis cette étroite maison à étages pour en faire un repaire pour les amoureux. Elle l’a bien sûr baptisée « Les fiancés de Sainte-Suzanne ». On peut au besoin y dormir à quatre, mais c’est évidemment plus intime et romantique à deux. 190 € pour deux nuits pour deux personnes avec petit déjeuner, possibilité de se faire livrer ses repas ou de demander les services d’une esthéticienne.
Tél. : 06 09 11 40 70 ou lesfiances.gite@orange.fr et voir sur gitedesfiances.blogspot.com
Juliette Durand chouchoute ses fiancés



Une Bentley bien racée
pour le château de la Cour

Des chambres aux élégants lits
 à baldaquins


Marie-Christine Levejac
Alain et Marie-Christine Levejac ont voulu abandonner la ville et les affaires pour habiter en pleine campagne dans ce superbe château du XVI è siècle blotti au pied du Mont Rochard, ceint de douves en eau. Ils ont tout fait eux-mêmes et peu à peu restauré la bâtisse, la dotant de quatre chambres d’hôtes, 70 à 105 € pour deux avec le petit déjeuner et d’un gîte pour 4 à 6 personnes aménagé dans l’ancienne tour de défense. Deux heures de visite de la région en Bentley  de 1953 grise et bordeaux vous coûteront 80 € pour deux personnes, le temps de vous prendre pour de vrais châtelains. 220 à 330 € selon le nombre la nuit dans le gîte pour au moins deux personnes.
Château de la Cour, Tél. : 02 43 58 19 73 ou chateaudelacour@gmail.com et voir le site sur www.chateau-de-la-cour.com
Pour en savoir plus, voir aussi info@tourisme-mayenne.com



2. Tintine dans les Alpes du Lac Majeur


Tintine partant à la conquête des Alpes


avec son gros copain


Les quatre principaux lacs du nord de l’Italie font partie de ces destinations de rêve dont tout le monde et même Tintine, a au moins entendu parler. On trouve ainsi, d’ouest en est, le Lac Majeur, sa célèbre Villa Borromée et ses jardins, celui de Lugano, de Cosme et de Lecco. Mais on connaît beaucoup moins bien les Alpes du Lac Majeur, région de parcs naturels ou nationaux, celui du Val Grande s’étendant sur 15 000 hectares au nord de Verbania. Hauts sommets aux neiges éternelles, le mont Basodino culminant à 3273 mètres, profondes forêts de conifères, chênes ou bouleaux, alpages d’altitude où se pratique encore la transhumance du bétail. Là sont enracinés de rudes chalets de pierre sèche et toits de lauze, puis les pâtures se creusent de gorges sauvages, torrents, lacs aux teintes d’émeraude ou de turquoise qu’on ne peut découvrir qu’en trek.

Arrivée avec ses copains sportifs à l’aéroport de Malpensa, à Milan, Tintine, bercée par le car qui les mène jusqu’à Oira di Crevoladossa, à quelques trente kilomètres à vol d’oiseau au nord ouest du Lac Majeur, se dit naïvement que les Alpes italiennes, après ses grimpettes himalayennes, ce n’est pas grand-chose… Mais elle doit compter avec les traîtres GO, qui proposent à chaque déjeuner précédant un nouveau trek de plantureux plateaux de fromages, dont le célèbre Bettelmatt à pâte dure, et de charcuteries escortées de l’étrange « lard gras », plutôt reconstituant. Tout cela est évidemment bien arrosé de vins rouges ou blancs provenant des vignobles d’altitude, assez corsés. Et Tintine, qui résiste mal à l’appel de son estomac, de traîner les pieds poussivement – les menus sont nettement moins réjouissants dans l’Himalaya et le thé beurré salé ne peut remplacer un bon gorgeon de vin de pays…


Escalade à Ovido

Départ de Baceno en direction des gorges d’Uriezzo, abruptement creusées dans la roche. Chaque fois que l’on croit se trouver dans une impasse, une faille se devine et on se coule entre les rocs. Tintine, qui a bien besoin d’encouragements après ses libations, s’est trouvée un protecteur, en l’espèce un superbe bâtard de Saint-Bernard qui connaît le chemin et l’encourage de vigoureux baisers baveux. Petite station à l’oratoire de Sainte-Lucie pour prier tous les saints des Alpes de lui prêter assistance, puis retour en boucle à Baceno. Sa curieuse église de San Gaudenzio datant du XII è siècle exhibe sur sa façade une gigantesque fresque de Saint-Christophe, le patron des voyageurs qui a tout intérêt à secourir Tintine s’il cherche une nouvelle fan.


Masseno

Hôtel Casa Fontana

L’hôtel Casa Fontana, vieux chalet plein de charme juché sur son promontoire, considère avec quelque hauteur le reste du village de Devero, blotti au pied du Monte Cervandone. Chambres lambrissées de bois et couettes rebondies. Le lendemain matin, après dîner et petit dèje tout aussi irrésistibles, départ de trek pour le parc naturel de Devero et les alpages d’un vert à faire rêver l’espérance. Le lac du même nom aux eaux émeraude, puis celui de Streghe penchant vers le turquoise donnent des envies de farniente, mais ce n’est hélas pas au programme. Nos amis italiens tenant à notre forme prévoient toujours un nouveau trek en guise de digestif. On emprunte cette fois l’ancienne voie médiévale menant de Croveo à Baceno, une heure de marche pour notre guide Pia et notre accompagnateur Roberto, à la forme redoutable, presque le double pour Tintine, dont la sobriété n’est décidément pas la vertu cardinale. Arrivée en car à Domodossola où le centre d’agritourisme de la Tensa se compose de plusieurs maisons de pierre sèche, édifiées en terrasses dans le style des chalets d’alpage.

Le lac de Streghe

Vers Croveo

Le jour suivant est consacré à la vallée plantée de vignoble en espalier, lac et parc de la haute vallée Antrona, au sud de Domodossola. A Bordo, au sommet d’un chemin muletier jalonné de drapeaux de prières, l’un des nombreux villages à présent abandonnés a séduit pour toujours un curieux personnage. Felice à l’éternel sourire,  mi pâtre mi bonze s’y est installé il y a près de trente ans pour suivre les préceptes de vie tibétains. Une compagne l’a rejoint il y a sept ans. A eux deux, ils restaurent les maisons ruinées, animent prières et méditations. Ils ont même construit un chorten (monument sacré abritant relique ou mantra, texte religieux) et un mandala, figure géométrique propice à la concentration.

 

Chorten à Bordo

Felice à Bordo

Autre son de cloche (ouh, Tintine n’a peur de rien) au Calvaire de Sacro Monte, couvent inscrit au patrimoine de l’Unesco pour la qualité de ses jardins et sa chapelle baroque décorée de saisissants personnages grandeur nature représentant une descente de croix. Ensuite, un petit train quelque peu poussif cahote à travers monts et vallons jusqu’au bourg sans grand caractère de Santa Maria Maggiore.

Calvaire de Sacro Monte

Saisissante Descente de croix

  

A trois kilomètres de là, Malesco abrite le musée archéologique du parc national Valgrande, plutôt un éco musée  témoignant de la vie rude des paysans en haute montagne, un siècle plus tôt, quand châtaignes, noix, fromages et salaisons constituaient l’essentiel des repas et revenus. La route vers le lac Majeur sinue par le val Cannobina jusqu’à la petite station balnéaire de Cannobio. C’est jour de marché. Vins et odorants produits du terroir s’étalent comme autant de tentations.

Les savoureux fromages de Cannobio

Après le déjeuner à l’agritourisme d’Archia, Tintine et ses copines refusent purement et simplement de découvrir parc national et anciennes fortifications militaires. La pluie et le brouillard ont eu raison de leur enthousiasme. Descente en 4x4 vers le lac où le temps s’apprivoise. De toute façon, il ne pleut pas dans les petits bistros et les élégantes boutiques de Pallanza, en face de l’île Borromée.

Le Lac Majeur vu du port de Pallanza

Shopping à Pallanza

Port et lac de Mergozzo

Aussi discret qu’enchanteur, le minuscule lac de Mergozzo séduit par son calme, son isolement, sa modestie, si près de son grand frère. Les maisons du village bariolées d’ocre et de safran restent presque frustres en comparaison des somptueuses villas jalonnant les rives du grand lac et l’hôtel des Due Palme où nous logeons se souvient à peine de ses splendeurs défuntes, mais c’est très bien comme ça !

 

Pour effectuer le même circuit ou découvrir autrement les Alpes du lac Majeur, adressez-vous à Maggiori –Tourist Marketing info@maggiori-tm.de ou regardez son site sur www.maggiori-tm.de

Lac de Mergozzo vu de la terrasse de l'hôtel des Due Palme

 

  3. Tintine en Seine Maritime

                                   Le bois des Moustiers


Les premiers mixed-borders
Lorsque Tintine était enfant, il y avait une maison de fée où la menait souvent sa grand-mère, qui la faisait beaucoup rêver. Ce n’était pas tant les biscuits aux gingembres de la délicieuse vieille fée que sa grand-mère appelait Mary que la maison elle-même, son jardin, le parc et ses mystères surplombant les falaises de la Côte d’Albâtre, autre nom magique. Les fenêtres ondulaient comme des vagues, les immenses cheminées rappelaient celles de son conte de la Barbe Bleue, les rhododendrons n’étaient pas de simples buissons comme chez elle mais de vrais arbres comme il en existait, lui disait-on, dans l’Himalaya. L’Himalaya et son abominable homme des neiges… Un jour, elle irait là. En attendant, elle y grimpait et s’y faisait des cachettes toutes fleuries de corolles multicolores, presque aussi grandes que son visage…
Des années plus tard, la maison du Bois des Moustiers n’a rien perdu pour elle de son charme, mais un coin du mystère s’est dévoilé lorsque Tintine en a appris l’histoire.

Les fondateurs, Guillaume et Adélaïde Mallet

Leur arrière-petit-fils, Antoine Bouchayer-Mallet

Le travail conjugué d’un architecte et d’une paysagiste anglais
Guillaume Mallet, le créateur du Bois des Moustiers, a trente-cinq ans lorsqu’il épouse Adelaïde Grunelius, une jeune fille issue comme lui de la haute bourgeoisie cosmopolite. Le jeune couple désire une maison et trouve celle de ses rêves ou presque lors d’un séjour à Dieppe. Les hautes falaises crayeuses coiffées de vert de Varengeville-sur-Mer les séduisent. C’est là qu’ils veulent vivre. Ils achètent une vaste bâtisse sans grand caractère plantée dans un parc de douze hectares surplombant la mer. Dans son enfance, Guillaume Mallet, héritier d’une famille de banquiers protestants, a vécu à Jouy-en-Josas, dans un parc à l’anglaise dessiné par Thomas Blaikie dont il garde la nostalgie, puis son séjour à l’île de Wight durant la guerre de 1870 n’a fait que conforter son goût pour les parcs à l’anglaise. Reste la bâtisse…
Une rencontre avec le jeune architecte de 29 ans, Edwin Lutyens, plus tard célèbre pour sa création à Delhi du palais du vice-roi des Indes, l’incite à lui confier « sa » demeure.
Pour en briser l’effet de cube assez lourd, Lutyens la flanque d’un nouveau corps de bâtiment abritant un vaste escalier intérieur et une multitude de petites fenêtres venues s’ajouter aux cinq principales, en encorbellement. La lumière du paysage marin peut alors entrer à flot. De hautes cheminées à la Tudor achèvent de lui donner de la prestance.
Sur les conseils du jeune architecte, le couple fait alors appel à la grande paysagiste anglaise anglaise Gertrude Jekyll qui va faire revivre les rêves d’enfant de Guillaume en mêlant audacieusement azalées de Chine et bruyères, rhododendrons de l’Himalaya, pins, hydrangéas, mais aussi cèdres d’Afrique, érables du Japon, qui s’enchevêtrent en un moutonnement coloré semblant sauvage, jusqu’à la mer. C’est aussi pour les Mallet que Gertrude Jekyll imagine ses premiers mixted borders, maintenant si à la mode, pour souligner les diverses chambres de verdure en une explosion de fleurs en apparence due au hasard.

Exemples de décoration Arts&Crafts


Le mouvement Arts & Crafts
Restait à meubler la vaste demeure en évitant l’habituel bric-à-brac victorien cher alors aux décorateurs. « Guillaume et Adelaïde, comme l’explique leur arrière petit-fils Antoine Bouchayer-Mallet, actuel directeur du Bois des Moustiers, souhaitaient offrir à leur maison un côté universel chargé d’une forte atmosphère. Ce devait être un tableau vivant incitant à s’y rendre les artistes de leur temps, mais aussi penseurs et philosophes. Tous ceux que réunissent un profond amour de la nature et de ses animaux, joint au respect de toutes les croyances humaines… »
Le mouvement Arts & Crafts, Arts et artisanats, né en Angleterre vers 1860 et surtout actif de 1880 à 1910, initiateur de l’Art nouveau français et belge, a succédé au mouvement des pré-raphaélites dont sont issus l’écrivain et poète John Ruskin et le décorateur William Morris qui en prennent la tête. En réaction contre l’époque victorienne toute-puissante ayant engendré le progrès industriel, la richesse mais aussi l’extrême pauvreté d’une classe ouvrière restée misérable, tous deux prônent le travail artisanal qui s’oppose à celui des chaînes d’usines. Ils fondent de nouvelles écoles où l’on réapprend broderie, tapisserie, impression à la planche, teintures naturelles, ébénisterie et marqueterie. Sur leur impulsion, des communautés d’artisans quittent alors l’enfer des grandes villes pour retrouver à la campagne l’amour du travail bien fait, de l’art qui doit se deviner partout, aussi bien dans les meubles que la vaisselle ou le moindre objet utilitaire, en choisissant toujours des matériaux authentiques. On met en valeur le style dépouillé, les formes simples, épurées. Les Mallet furent bien sûr séduits par ce mouvement correspondant à leurs goûts et convictions et l’adoptèrent. Ce qui donne un intérieur confortable, facile à vivre, mais peu meublé. Il n’y a que le nécessaire. L’atmosphère de la maison suffit au reste…

Le piano sur lequel joua Stravinsky

Des fenêtres en vagues

Artistes et penseurs au Bois des Moustiers
Pour les artistes, c’est la mode de travailler « sur le motif ». Bientôt, des peintres et sculpteurs tels que Monet, Renoir, Pissarro, Isabey, Degas, Corot, Miro, plus tard Picasso, Calder ou des Anglais comme Turner, Whistler, Beardsley ou Walter Crane désertent leurs ateliers des villes pour s’inspirer plus directement de la nature. Attirés par la pureté de l’air de cette Côte d’Albâtre, la poésie des falaises léchées ou battues par les vagues, le charme de la campagne normande, ils se retrouvent volontiers à Varengeville, qui devient ainsi un « village d’artistes ». Quand ils le souhaitent, ils sont reçus au Bois des Moustiers et invités à y séjourner. Jacques-Emile Blanche devient le portraitiste attitré de la famille Mallet.
Varengeville est vite follement à la mode. Ecrivains et poètes s’y pressent aussi, ne manquant pas de visiter les hôtes du Bois des Moustiers : Dorgelès, Saint-John Perse, Proust, André Breton, Prévert, mais aussi Virginia Woolf, Paul Valéry qui y a écrit son célèbre Cimetière marin. Ecoutons cette évocation du jeune Jean Cocteau après une visite enchantée au Bois des Moustiers :
« Persicaire (c’est ainsi qu’il nomme André Gide dans ses écrits), vous avez oublié ce parc. Je suis certain de m’y être promené, un soir, avec vous. Il descendait jusqu’au bord de la mer. C’était, Persicaire, un vaste domaine au crépuscule : une aube de la nuit. On n’entendait pas la mer. On traversait, si je m’y retrouve, quatre petites cours de cloître à l’italienne. Attendez, on tournait à droite… une cour de volubilis et d’héliotropes… je compte sept marches. Nous entendîmes jouer du piano. »
Cocteau ne nous dit pas qui jouait ce soir-là, mais on sait que Ravel, Reynaldo Hann et Albert Roussel, qui repose au cimetière marin, aimèrent Varengeville. Debussy et Eric Satie jouèrent au piano que l’on peut toujours voir au salon…

Le nombre sept est omni-présent, ici sur les nervures de
briques et les pots du bassin


La symbolique théosophique du Bois des Moustiers
On ne discute pas que d’art, de fraternité et d’osmose avec la nature, au Bois des Moustiers ou plutôt, bon nombre de ces idées rejoignent celles d’un mouvement né à New York en 1875, le 7 septembre mais officiellement le 17 novembre, celui de la Theosophical Society. Et, explique encore Antoine Bouchayer-Mallet, Guillaume et son épouse furent d’ardents adeptes de la Théosophie, ce qui explique l’abondance du symbolique nombre sept dans leur jardin, ainsi que la flore exotique. Outre les sept marches évoquées par Cocteau, sept rayons de briques partent de la porte d’une cour de verdure, sept vases bordent le bassin…
Cette société poursuit trois buts : accéder à une fraternité universelle sans distinction de race, couleur ou croyance ; étudier comparativement les religions, sciences et philosophies ; mettre en lumière les pouvoirs psychiques et spirituels présents dans chaque être humain.
La fondatrice de cette société, qui n’en est officiellement que secrétaire correspondante, est une certaine Helena Blavatsky, née le 30 juillet 1831 en Russie. En plus de vingt ans de voyages, cette femme, infatigable à l’instar d’Alexandra David-Neel, va rencontrer chamans, lamas, yogins, spirites, médiums et autres sages. Elle prétend capter les pensées de personnes vivantes ou mortes, qui l’initient à leur sagesse. Mariée deux fois (des mariages jamais consommés) puis vite divorcée, elle s’attache à rapprocher l’Orient de l’Occident, puis bientôt, à découvrir le sens de la mort dans la perspective bouddhiste et hindouiste de la réincarnation. Elle décrit croyances et expériences dans un premier livre en 1877, Isis dévoilée. Puis, lors d’une troisième série de voyages, de 1879 à 1885, elle installe le centre mondial de la Société Théosophique à Âdyar, en Inde, près de Madras.


Ces rhododendrons de l'Himalaya
qu'aima tant Helena
Malade, obèse et fatiguée, elle revient deux ans plus tard à Londres où elle publie sa Doctrine secrète, puis La Clef de la Théosophie. Le Glossaire de la Philosophie ne sera édité qu’après sa mort, survenue le 8 mai 1891 à Londres. Certains voient en elle une grande érudite à l’œuvre capitale, d’autres une faussaire ayant vulgarisé des œuvres ésotériques de seconde main. Sa doctrine, appelée aussi Septenaire pour la puissance de la symbolique de ce nombre que l’on retrouve partout dans le jardin des Mallet, fortement inspirée de l’hindouisme, considère qu’un être humain possèderait « sept corps », son organisme visible et six autres, invisibles, les corps subtils que la conscience du Soi permet enfin de peu à peu révéler. Une quête qui animait Guillaume et Adélaïde Mallet. Un mysticisme qui imprègne toujours ces lieux.

Le Bois des Moustiers, Route de l’Eglise, 76119 Varengeville-sur-Mer, Tél. : 02 35 85 10 02.

Survol en hélicoptère du pont de Brotonne

Que découvrir d’autre en Seine-Maritime
. Survoler en hélicoptère boucles de la Seine et blanches falaises d’Etretat, un spectacle inoubliable par temps clair. Renseignements à l’aéroport de Boos, aux environs de Rouen. Rue Maryse Bastié, BP 87, 76520 Boos, Tél. : 02 36 79 41 00.

Le père portier de l'abbaye devant une statue
 de la Vierge

Le cloître gothique
. Visiter l’abbaye de Fontenelle, à Saint Wandrille, lieu de retraite préféré de l’abbé Pierre, admirer les entrelacs gothiques de son cloître et la beauté de sa grange dîmière reconvertie en église. 2, rue Saint-Jacques, 76490 Saint-Wandrille Rançon, Tél. : 02 35 96 23 11.
. Evoquer les bains de mer d’antan, à Dieppe, quand la haute société parisienne et la cour de Charles X commencèrent à fréquenter cette station balnéaire sous l’impulsion de la belle-fille du roi. Vêtue d’un costume brun galonné de bleu, chaussée de bottes, conduite par le Médecin Inspecteur des bains en habit de cour, encadrée par les « baigneurs-jurés », les secouristes de l’époque, la duchesse de Berry entrait dans l’eau, observée par plus d’un millier de Dieppois, médusés. dieppehistoire@mairie-dieppe.fr


Le manoir de Retival à Caudebec

Et son inventif chef David Goerne
. Déjeuner face à la Seine, à l’étonnant Manoir de Rétival où le jeune chef propose un menu dégustation aussi inventif que surprenant. Avenue Winston Churchill, 76490 Caudebec-en-Caux, Tél. : 06 61 66 46 02.
. Sortir en mer sur un vieux gréement, à Fécamp, et demander si possible le capitaine Astérix, dont la verve vaut tous les calvas normands. Office de Tourisme, Quai Sadi Carnot, 76400 Fécamp, Tél. : 02 35 28 51 01.

Ambiance romantique face à la fameuse
Aiguille Creuse d'Etretat

Le Tante Fine quitte Fécamp

Astérix, le patron
. Dîner devant la mer, aux Terre-Neuvas de Fécamp, nom que l’on donnait aux marins qui s’embarquaient pour pêcher jusqu’à la lointaine Terre-Neuve, un restaurant à l’élégant design. 63, Bd Albert Ier, 76400 Fécamp, Tél. : 02 35 29 22 92.
. Dormir au Donjon du domaine de Saint Clair, où les chambres évoquent la Belle Epoque et permettent une vue incomparable sur l’Aiguille Creuse chère à Arsène Lupin. Chemin de Saint Clair, 76790 Etretat, Tél. : 02 35 27 08 23.

Le domaine Saint-Clair

Et sa vue sur Etretat
. Suivre à Veules les roses les méandres du plus petit fleuve de France, mais aussi le plus charmant, la Veules, le long duquel croissent les cressonnières et tournent les roues à aube des quatre moulins subsistant sur les onze existant encore au début de l’autre siècle. Office de Tourisme, 27, rue Victor Hugo, 76 980 Veules-les-Roses, Tél. : 02 35 97 63 05.

L'un des moulins de Veules-les-Roses

Patrick Mahieu dans sa cressonnière
. Déguster l’huître de Normandie, en guise d’apéritif. A la fois iodée et charnue, elle est à juste titre réputée.  www.huitres-normandes.com, avant de déjeuner aux Terrasses, également dans un site enchanteur. Route de Vasterival, 76119 Varengeville-sur-Mer, Tél. : 02 35 85 12 54.
Les huîtres veulaises
Quand le bleu des fleurs de lin se confond avec celui de la mer

Retour de pêche

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